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    73. Nature

     

    FR

    Son sourire éclaire l’horizon d’un soleil naissant,
    Une lueur timide qui fend les nues d’un éclat tremblant.
    Ses yeux sont deux lacs à l’eau pure, azur sans limite,
    Miroirs des cieux où l’âme s’égare, pourtant interdite.

    Elle apparaît, fragile vision dans la lumière diffuse,
    Et le sablier du temps suspend ses grains, me refuse.
    L’admiration déborde, comme un torrent secret,
    Roulant ses eaux dans l’ombre d’un vallon discret.

    Ses cheveux mêlent l’or des blés mûrs, la terre brune et le givre pur,
    Ils s’épanouissent comme des branches qu’un vent subtil murmure.
    Couronne tissée d’humus et d’éclats d’étoiles,
    Majesté forestière qu’aucune vanité ne dévoile.

    Les mots s’effacent, seuls résonnent les bois et les rivières,
    Nos silences deviennent l’écho d’un monde primitif et sincère.
    Un chant d’oiseaux au crépuscule, un souffle d’éden,
    Où chaque feuille parle d’un temps hors des existences humaines.

    Elle porte en elle la lumière du soleil couchant,
    Que l’ombre jalouse d’un feu incandescent.
    Son âme est une mer profonde, une vague en quête,
    De récifs invisibles, de passions secrètes.

    Mais un voile de brume s’interpose, tenace,
    Elle est là-bas, écrivant son destin dans l’éclat de l’espace.
    Sous les étoiles, elle marche, libre et fière,
    Et je contemple ce tableau, captif de cette lumière.

    Je n’écris pas pour troubler la source cristalline,
    Mais pour déposer mes mots en une rosée divine,
    Offrir un trésor discret, un murmure de vent,
    Un souffle effleurant sa joue, doux et transparent.

    À cette terre céleste, je confie mon désir,
    Que dans mes nuits, elle soit l’étoile à saisir.
    Un feu tendre, un brasier sage, une flamme éternelle,
    Illuminant mes ombres d’une lumière immortelle.

    Et si mes mots parviennent jusqu’à son cœur,
    Qu’elle sache qu’ils ne veulent éveiller nulle douleur.
    Ils sont la pluie d’un orage fugace, une ondée de vie,
    Un reflet des splendeurs qu’en elle mon âme s’épanouit.

     

    EN

    Her smile lights the horizon like a rising sun,
    A timid glow piercing the clouds with trembling brilliance.
    Her eyes are two lakes of pure, boundless azure,
    Mirrors of the heavens where the soul wanders, yet is forbidden.

    She appears, a fragile vision in diffused light,
    And the hourglass of time halts its grains, denying me.
    Admiration overflows, like a secret torrent,
    Rolling its waters through the shadows of a secluded valley.

    Her hair weaves the gold of ripe wheat, the rich earth, and pure frost,
    Unfolding like branches murmured to by a subtle breeze.
    A crown of humus and stardust intertwined,
    A forest majesty untouched by vanity’s reveal.

    Words fade away; only the woods and rivers resonate,
    Our silences become the echo of a primitive and sincere world.
    A bird’s song at dusk, a breath of Eden,
    Where every leaf whispers of a time beyond human existence.

    She carries within her the light of the setting sun,
    Jealously shadowed by an incandescent flame.
    Her soul is a deep sea, a wave in search,
    Of unseen reefs, of secret passions.

    Yet a veil of mist interposes, stubborn and tenacious,
    She lingers afar, writing her destiny in the expanse of space.
    Beneath the stars, she walks, free and proud,
    And I behold this tableau, captive to her light.

    I do not write to disturb the crystalline source,
    But to lay down my words as divine dew,
    To offer a discreet treasure, a whisper of the wind,
    A breath grazing her cheek, soft and transparent.

    To this celestial earth, I entrust my desire,
    That in my nights, she may be the star to reach for.
    A tender fire, a wise blaze, an eternal flame,
    Illuminating my shadows with immortal light.

    And if my words should find their way to her heart,
    May she know they seek to awaken no pain.
    They are the rain of a fleeting storm, a shower of life,
    A reflection of the splendors that make my soul bloom in her.

    David – Poésie
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    La Présence pure de Christian Bobin

    Dans son recueil La Présence pure, Christian Bobin, à travers ses textes empreints de lumière et de silence, nous offre une exploration bouleversante de l’essence même de la vie. Ce livre, paru dans la collection Poésie de Gallimard, se situe à la croisée de la méditation et de la poésie. Bobin y déploie une écriture où chaque mot semble taillé pour révéler l’éphémère et l’infini à la fois.

    Il est un des poètes qui m’a le plus influencé. Je m’avoue très chanceux d’avoir pu le côtoyer dans notre époque et d’avoir pu l’entendre développer sa poésie de son vivant. La pertinence de son regard, de son esprit m’a touché sur à peu prêt l’ensemble de son œuvre que je vous invite à découvrir, si cela n’est pas déjà fait.

    L’écriture de Christian Bobin se caractérise par une apparente simplicité. Mais sous cette épure, une profondeur vertigineuse se déploie. La Présence pure n’est pas seulement une suite de textes, c’est une suite de moments capturés, comme si l’auteur nous tendait un miroir pour contempler la beauté de ce qui, d’ordinaire, passe inaperçu.

    Bobin s’attarde sur les détails. Un rayon de soleil traversant une fenêtre, un sourire qui éclaire un visage, le bruissement des feuilles dans le vent… Ces petits riens deviennent chez lui des épiphanies, des révélations de la présence du divin dans le quotidien. À travers cette attention portée à l’instant, Bobin nous invite à ralentir, à respirer, à voir.

    La Présence pure est aussi un acte de résistance face à un monde dominé par la vitesse et le bruit. Dans une société où tout semble devoir être mesuré, productif, utile, Bobin s’élève avec douceur pour chanter la gratuité de la contemplation, la richesse de l’inutile.

    Cette présence, il la décrit comme un état d’être où l’on se rend disponible au monde et aux autres. Ce n’est pas une présence conquérante ou dominante, mais une présence humble, réceptive, qui accueille ce qui est, tel que c’est.

    L’un des thèmes centraux du livre est l’invisible. Bobin nous rappelle que ce qui compte le plus dans la vie ne se voit pas, ou du moins pas avec les yeux. L’amour, la beauté, la foi… Autant de réalités qui échappent aux cadres, aux chiffres, aux écrans.

    Dans La Présence pure, chaque texte est une tentative d’approcher cet invisible, de le nommer sans le figer. Et dans cette quête, Bobin rejoint la grande tradition mystique, où le langage est à la fois un pont et une limite face à l’indicible.

    Lire Bobin, c’est se sentir à la fois proche de lui, comme si chaque mot avait été écrit pour nous, et proche de soi, car ses mots résonnent avec nos propres expériences, nos propres questionnements. Mais c’est aussi une ouverture à l’universel, car en parlant de l’invisible, de la présence, de l’éphémère, Bobin parle de ce qui nous relie tous.

    Si la mort est présente en filigrane dans ce recueil — comme elle l’est souvent chez Bobin —, elle n’est jamais une fin. Elle est plutôt une ouverture, un passage, un rappel de la préciosité de chaque instant. Et cette lumière qui traverse la mort illumine chaque page, chaque mot, chaque silence du livre.

    Il est intéressant de noter que l’écriture de Christian Bobin est souvent nourrie par des moments de solitude et de retrait. Dans plusieurs entretiens, il a confié que c’est dans ces instants de silence qu’il trouve son inspiration. Pour lui, écrire, c’est avant tout être à l’écoute : à l’écoute de soi, des autres, du monde.

    Une anecdote touchante raconte comment Bobin, après avoir terminé un manuscrit, aimait se promener longuement dans les forêts de son Charolais natal. Ces marches, selon lui, étaient une manière de laisser les mots trouver leur place, de les libérer.

    Un Poème pour Clôturer

    Pour conclure cette chronique, voici un extrait qui capture l’esprit de La Présence pure :

    « Le plus grand mystère n’est pas dans les étoiles ou dans la mer.

    Le plus grand mystère est dans le battement de ton cœur,

    Dans ce silence qui parle lorsque tu regardes le monde

    Avec les yeux d’un enfant. »

    Cet extrait résume magnifiquement l’œuvre de Bobin : une invitation à retrouver un regard neuf sur le monde, à embrasser l’instant présent, à honorer la vie dans sa plus grande pureté. La Présence pure est un livre qui se savoure, qui se respire, qui se vit. Il ne laisse jamais indemne, mais il guérit toujours un peu.

    David – Poète & Philosophe

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    72. Foi

    FR

    Tout glisse, me fait peur,
    S’enfonce tant que je pense,
    Et d’un roulement, lisse mon cœur.
    Mes humeurs, sans autre importance
    Que celle de cette noirceur, ma demeure.

    Pourtant, je combats cette démence
    À chaque instant, avec effroi,
    Sans savoir où cela réellement me mènera.
    Alors, je garde éternellement en moi
    L’étincelle éclairante de la foi,
    Qui, de sa chaleur, maintes fois me guida.

    Le prisme des illusions,
    M’éclairant vainement de leurs lumières blafardes,
    Nourrit encore, pourtant, chacune de mes décisions.
    En pauvre diable, c’est bien d’elles dont je parle
    Depuis tant d’années, plantée dans mon esprit, cette écharde.

    EN

    Everything slips away, fills me with fear,
    Sinks deeper as my thoughts take hold,
    And with a turning motion, smooths my heart.
    My moods, of no importance
    Save for the darkness that is my home.

    Yet I fight this madness
    At every moment, with dread,
    Not knowing where it will truly lead me.
    And so, I keep forever within me
    The illuminating spark of faith,
    Which, with its warmth, has guided me time and again.

    The prism of illusions,
    Futilely lighting me with their pale glows,
    Still feeds, nonetheless, each of my decisions.
    A poor devil, it is of them I speak,
    For so many years, this thorn planted in my mind.

    David – Poésie

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    Dans l’amour, il y a quelque chose de chimique.
    Une fusion entre deux éléments qui ne forment qu’un et qui explose, qui déborde.
    Si je tombe en amour avec un paysage, ce n’est pas le temps ou l’habitude qui me rendra amoureux de ce paysage.
    Si l’amour devient l’affaire du temps, alors parlons d’habitude, de rituel, de convention…
    En amour, le temps tire sa plus belle révérence pour fuir dans l’éternité.

    In love, there is something chemical.
    A fusion between two elements that become one and that explodes, that overflows.
    If I fall in love with a landscape, it is not time or habit that will make me fall in love with that landscape.
    If love becomes a matter of time, then let’s talk about habit, ritual, convention…
    In love, time makes its most beautiful bow to flee into eternity.

    David – Poète & Philosophe

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    Exercices spirituels et philosophie antique de Pierre Hadot

    Dans l’univers des idées et des pratiques philosophiques anciennes, peu d’auteurs ont su révéler avec autant de clarté et de profondeur l’essence de la philosophie antique que Pierre Hadot.

    Son ouvrage « Exercices spirituels et philosophie antique », publié par Albin Michel, est une exploration de l’enseignement des grands philosophes de l’Antiquité, présenté sous l’éclairage particulièrement enrichissant des exercices spirituels.

    Cet article se propose de vous emmener au cœur de ce livre fascinant, où la philosophie se conçoit non pas simplement comme un discours abstrait, mais comme une pratique quotidienne, un art de vivre.

    Pierre Hadot démarre avec une idée fondamentale : la philosophie antique n’était pas d’abord une construction théorique ou une activité purement intellectuelle. Elle était avant tout une manière de vivre, un ensemble de pratiques concrètes qui visaient à transformer l’existence. Hadot appelle ces pratiques des exercices spirituels, c’est-à-dire des activités qui transforment la perception du monde et la manière dont on s’y engage. Pour les philosophes antiques tels que les Stoïciens, les Épicuriens ou encore les Platoniciens, philosopher signifiait s’exercer quotidiennement à être sage, maîtriser ses passions, et appréhender le monde avec objectivité et recul.

    Cette notion d’exercices spirituels est centrale chez Hadot, car elle redonne à la philosophie sa dimension pratique, qui a été trop souvent éclipée par les exigences académiques modernes. Pour Hadot, la philosophie antique consistait à vivre en harmonie avec soi-même, avec la nature, et avec les autres. Les exercices spirituels tels que la méditation, l’examen de conscience, la contemplation de la nature ou encore l’entraînement à la vertu étaient autant de moyens pour atteindre la paix intérieure et l’eudaimonia — la « vie bonne ».

    Hadot se concentre sur plusieurs écoles philosophiques, notamment le Stoïcisme, l’Épicurisme, et le Néoplatonisme. Il montre comment chaque école préconisait une série d’exercices conçus pour guérir l’âme de ses tourments, réduire les désirs superflus, et apprendre à se concentrer sur ce qui dépend vraiment de nous. Chez les Stoïciens, par exemple, l’accent est mis sur la distinction entre ce qui est en notre pouvoir et ce qui ne l’est pas, ce qui conduit à une profonde libération vis-à-vis des attachements irrationnels.

    L’Épicurisme, quant à lui, valorise la poursuite de plaisirs simples et naturels, mais insiste sur la prudence et l’amitié comme éléments essentiels au bonheur. Les disciples d’Épicure s’entraînaient à la méditation sur la mort — le fameux memento mori — pour relativiser leurs peurs et se recentrer sur les plaisirs authentiques de l’existence.

    Le Néoplatonisme, pour sa part, engageait l’âme sur un chemin ascendant de contemplation, cherchant l’unité avec l’Intelligible, la véritable source de la réalité. Ces différents exercices spirituels formaient un ensemble d’outils destinés à ouvrir la conscience à des niveaux supérieurs de réflexion et de perception, guidant ainsi l’individu vers un accomplissement spirituel.

    Ce qui est particulièrement fascinant dans la lecture de Pierre Hadot, c’est sa manière de faire revivre ces pratiques philosophiques pour notre époque contemporaine. Il montre à quel point ces enseignements sont actuels et peuvent encore inspirer notre vie quotidienne. Hadot ne présente pas seulement la philosophie antique comme une matière historique, mais comme une source vive de sagesse, capable de nous aider à surmonter les pressions de la vie moderne, à retrouver une certaine tranquillité d’esprit, et à réévaluer ce qui compte vraiment.

    Pour Hadot, l’exercice spirituel n’est pas un acte isolé, mais une pratique répétée qui doit imprégner toute notre existence. Philosopher, dans cette perspective, signifie cultiver l’âme comme on cultive un jardin. Cela demande patience, persévérance, et détermination — des qualités que les philosophes antiques cherchaient à développer par des exercices quotidiens.

    Lire « Exercices spirituels et philosophie antique » aujourd’hui, c’est redécouvrir l’essence même de la philosophie : une recherche de sagesse qui se pratique au quotidien, une voie de transformation personnelle. Dans un monde souvent déchiré par l’agitation et le bruit, la lecture de Hadot nous invite à prendre du recul, à entrer en dialogue avec les Anciens et à intégrer à notre vie moderne des pratiques de sagesse intemporelles.

    Que vous soyez amateur de philosophie, poète en quête d’émerveillement ou simplement à la recherche d’une façon de vivre plus sereine, ce livre offre des pistes réelles pour réévaluer votre quotidien. Hadot nous rappelle que la sagesse n’est pas un idéal abstrait, mais une pratique constante, un chemin sur lequel chaque pas compte.

    En conclusion

    « Exercices spirituels et philosophie antique » est une invitation à la méditation et à la transformation de soi. Pierre Hadot, par son érudition et sa sensibilité, redonne vie à des pratiques ancestrales qui, bien que souvent négligées aujourd’hui, n’ont jamais été aussi nécessaires. En ces temps où l’on cherche souvent à combler le vide existentiel par des distractions éphémères, Hadot nous propose de retrouver le vrai sens de la philosophie : l’art de mener une vie bonne et heureuse, malgré les incertitudes du destin.

    Si vous souhaitez explorer comment la philosophie antique peut enrichir votre propre cheminement spirituel, ce livre est un compagnon idéal. Pourquoi ne pas commencer aujourd’hui votre propre exercice spirituel, en suivant les traces des grands sages de l’Antiquité ?

    David – Poète & Philosophe